Pourquoi un pape dut la vie sauve à un Mauriennais ?

Posted By: Nadine CHARNAY On: Comment: 0 Hit: 4000

Saviez-vous que la Savoie regorge d’anecdotes étonnantes et de secrets bien gardés ? De Napoléon III à la Patrouille de France, en passant par un âne royal ou une mystérieuse chute de montagne, notre région n’a pas fini de vous surprendre !

Chaque mois, nous vous proposons une histoire insolite issue du livre Les Pourquoi des pays de Savoie, un ouvrage où l’auteur Jean-Olivier Viout explore avec passion et précision les curiosités savoyardes. Préparez-vous à découvrir la Savoie sous un nouvel angle…

Ce mois-ci, découvrons pourquoi un pape dut la vie sauve à un Mauriennais !

Cela se passait en 1812, sous le premier Empire, et ce pape était le pape Pie VII. En 1809, il avait subi l’envahissement de ses États pontificaux par les troupes françaises et avait été fait prisonnier. Transféré à Savone, il moisissait en résidence surveillée, dans cette ville, depuis bientôt trois ans. 

Le 9 juin 1812, on l’avait secrètement placé dans une voiture après lui avoir ordonné de se dévêtir de ses vêtements pontificaux, afin de garantir son anonymat. Avait pris place, à ses côtés, son médecin personnel, car, âgé de 70 ans, le souverain pontife souffrait d’une strangurie générant une rétention urinaire pouvant s’avérer fatale. 

Le convoi clandestin avait pris la direction de la France, Napoléon ayant décidé de détenir désormais le pape dans son château de Fontainebleau. Mais, au bout de quelques heures de route, la maladie s’était aggravée au point de susciter les alarmes de son médecin. C’est dans un état pitoyable que le 10 juin, vers 3 heures du matin, il parvient à l’hospice du col du Mont-Cenis. 

Il est inenvisageable de lui faire reprendre la route le lendemain. Tandis que le recteur de l’hospice, Don Gabet, lui administre l’extrême-onction, le responsable du transfert de ce détenu hors norme sollicite des ordres de sa hiérarchie pour différer la reprise du voyage. 

Mais l’état du souverain pontife empire, il est mourant. Après avoir refusé tout autre concours médical qui mettrait en péril le secret absolu devant entourer l’arrestation du pape et son transfert en France, on finit par se résoudre à envoyer une estafette à Lanslebourg, au pied du col, pour solliciter l’intervention du médecin du village. Il s’agit du docteur Balthazar Claraz, natif de Lanslevillard, officier de santé pour les troupes impériales faisant étape au mont Cenis. Muni d’une sonde, il se rend d’urgence auprès du patient. 

À son arrivée sur les lieux, le docteur Claraz reçoit cette injonction : « Vous allez voir un malade dont l’identité doit rester secrète mais vous le reconnaîtrez. Si vous veniez à le divulguer, tremblez… car il y va de votre liberté, et peut-être de votre vie ». 

Sans avoir besoin de cette mise en garde, le diligent médecin s’emploie activement à apaiser les douleurs du Saint-Père et à juguler l’éclatement imminent de sa vessie. On envisage alors de poursuivre le voyage en installant une couche dans la voiture du prisonnier et en intimant l’ordre au docteur Claraz de demeurer aux côtés du malade durant tout le reste du voyage. Ce dont il devra s’exécuter. 

Finalement le pape, grâce aux soins avisés du docteur Claraz, parviendra sain et sauf à Fontainebleau, six jours plus tard. 

En 1817, en signe de reconnaissance pour lui avoir sauvé la vie, Pie VII, après avoir recouvré son siège pontifical à la suite de la chute de Napoléon, tiendra à recevoir personnellement le docteur Claraz pour lui conférer le titre de médecin honoraire du Saint-Père et lui offrir une de ses mules, ces pantoufles blanches ou rouges dont les papes étaient alors chaussés. 

Les descendants du bon médecin mauriennais la conservent aujourd’hui encore, avec un soin jaloux, tel un précieux bijou de famille. Ils viennent généreusement de lui faire rejoindre les collections du musée de Saint-Jean-de-Maurienne.

Retrouvez toutes les anecdotes de notre territoire dans les tomes 1 et 2 des Pourquoi des pays de Savoie !
    ⭐ Le tome 1, c'est par ici !
    ⭐ Le tome 2, c'est par là !

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